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Edit : 20 intéressés : (24 juin 6 h 20)
- JM² (deux, un de chaque)
- Patrice330 (220mm grande lentille)
- Jafarkiller
- Chtit couteau (celui avec la grande lentille)
- jean83
- Perry (grande lentille)
- Boyo rouche (intéressé par un modèle de chaque)
- Cram (grande lentille)
- Theantonin (grande lentille)
- JLG (petite lentille)
- Jack (grande lentille)
- .LuD. (petite lentille)
- Gurkhan (petite lentille)
- Dysoner (petite lentille)
- Berno (deux avec petite lentille)
- Loic (deux, un de chaque)
- SuperLoutre (deux, un de chaque)
- Lichtenfeld (deux petites lentilles)
- Tertior (petite lentille)
- Horticulteur (petite lentille)
aliaswonder a écrit:Dans le petit monde de l’higonokami artisanal, il y a les higonokamis des villes et les higonokamis des champs.
Les premiers sont des couteaux de lettrés et de citadins destinés à des tâches délicates comme tailler des crayons, couper du papier ou éventuellement trancher un fruit. Ils sont précieux et raffinés, plutôt de petites taille et minutieusement réalisés, s’ouvrent d’une main d’un geste élégant et se nichent sans problème au fond d’une poche.
Par comparaison, les higonokamis des champs sont rustiques, costauds et de taille et de poids beaucoup plus respectables. Refusant toute sophistication décorative qui pourrait nuire à leur fonctionnalité, ils sont conçus pour être des outils coupants destinés aux travaux sérieux et exigeants. Ils sont ainsi réduits à l’essentiel : un manche solide et une lame avec un tranchant redoutable. Sans renier leur nature première de couteau populaire, (humble, pas cher, efficace et solide), ils dégagent, dans leur extrême simplicité, si on sait y regarder, une sorte de beauté intérieure propre aux vrais outils.
C’est un trait très japonais : à côté de choses d’un raffinement poussé à l’extrême, on apprécie aussi des objets très frustres et primitifs qui laissent parfois l’observateur étranger songeur. Qu’a-t’il de si particulier ce couteau moche qui semble inachevée et que peuvent-ils bien voir dans ces bouts de métal a peine dégrossis ? Il faut apprendre à regarder derrière l’apparence des choses.
Ces deux exemplaires d’higonokamis des champs viennent du fin fond du Japon rural, de la région de Koshi au sud-ouest de l’île de Shikoku, réputée pour ses nombreuses rivières. Ils sont fabriqués par l’atelier Kurogane, la forge de « l’acier noir » tenue par Mitunori Okada un ex-ingénieur en métallurgie, né en 1948, devenu forgeron autodidacte et son disciple Nobuya Hayashi. Au rythme de la nature qui l’environne, l’atelier forge des couteaux et des outils selon des méthodes et un esprit traditionnels. Ils fabriquent même leur propre acier avec du minerai local, du charbon de bois maison et un Tatara artisanal.
Pour autant ce n’est pas du Tamahagane…
Les deux bestioles sont arrivées dans de jolies boîtes en bois calligraphiées et signées de la main de l’artisan. J’aime le contraste entre la fragilité de ces boîtes et la rusticité des hôtes qu’elles hébergent. De vraies bêtes sauvages dans des écrins de bijoux.
Leur créateur les appelle « les Enfants de la Montagne ». Je suppose que la dites montagne certainement proche de l’atelier, doit avoir ses esprits, ses kamis millénaires qui ont veillé à la genèse de l’acier, donnant ses sables, son eau, son bois pour que couteau se fasse. Mais c’est encore mon imagination qui s’emballe.
Voici donc deux engins sérieux.
Ils se dévoilent dans un dépouillement extrême avec des manches identiques, en fer plié et martelé, peints en noir brillant, un axe en acier et des rondelles de laiton.
N’essayez pas de les ouvrir avec une main, vous n’y arriverez pas, il faut les deux. Ce sont des couteaux qu’on ouvre lorsqu’on veut vraiment s’en servir, pas pour jouer.
Une fois ouvert, on a l’impression de tenir un fixe. Pas de danger que la lame se referme sur les doigts si on oublie de mettre le pouce sur la lentille. La friction est si dure qu’il faut aussi deux mains pour refermer le couteau. Je vous le disais, ce sont des fauves, brutes de forge, c’est le cas de le dire. Pas vraiment des couteaux de poche, ils ont plutôt leur place sur l’établi ou dans la caisse à outil…
Les deux couteaux sont légèrement différents.
Le premier à une lame plus haute et plus épaisse et une lentille surdimensionnée qui vient se loger au creux de la paume lorsque le couteau est déplié. On pourrait appeler cela le « hand-lock ». Des deux, c’est celui qui ressemble le plus à un outil de jardinier ou de charpentier On dirait un couteau de maréchal ferrant ! La lame de 85 mm fait 4 mm d’épaisseur et 20mm dans sa plus grande largeur. Le manche lui mesure 11,4 cm.
À côté, le second fait presque civilisé avec sa lame plus fine signé du nom de son créateur par des kanji gravés dans l’acier et son chikiri (lentille) plus réduit. Les dimensions, 85mm de lame pour 11,2 cm de manche sont quasi identiques à l’exception de la largeur (17mm) et de l’épaisseur de la lame (3,5mm).
Les lames sont laissées partiellement brutes de forge, avec des restes de calamine, des patines d’irisations, des traces de coups de marteaux. Seule l’émouture, d’une grande précision et parfaitement symétrique, laisse apparaître la structure interne du métal et les trois couches du sanmai.
Pour les préserver de l’oxydation, les lames sont vernies.
La forme en bec-de-corbeau diffère des lames d’higonokamis habituels, mais j’ai remarqué qu’il n’y avait pas de règles fixes dans ce domaine et que ces différentes formes ont toujours coexistées. Simplement elles étaient moins répandues.
J’aime leur nature sauvage, leur humble simplicité. Ils nous ramènent à l’essentiel, à la définition première de l’outil et du couteau. Ils nous donnent la nostalgie d’une époque qu’on n’a pas connue et dont seuls certains petits vieux se rappellent, lorsque pour avoir un outil, on n’allait pas dans une grande surface mais chez le taillandier du coin. Sans rien pour distraire l’œil comme s’ils étaient faits de seulement quelques gestes précis et experts a la manière d’une calligraphie. Quelques traits de pinceaux et un peu d’encre font tout un tableau.
Je les ai dénichés sur un site japonais, trouvés presque par hasard pendant une séance de cyber-chasse à l’higo. Je cliquais sur des pages en japonais, lorsque soudain l’un d’eux est apparu en photo.
Sans grand espoir, j’ai envoyé un mail et à ma grande surprise, on m’a répondu en anglais. Si cela vous intéresse, armez vous d’un peu de patience pour les réponses. Il semble qu’ils aient besoin de temps pour traduire…
Pourquoi deux me direz-vous ? Et bien à cause du prix : 6500 Yens soit 48 euros sans FDP. À ce prix-là, pourquoi se priver ? Qui dit mieux pour des couteaux artisanaux de cette qualité ?
Email : kurogane@mx8.tiki.ne.jp
Site Web : http://ww8.tiki.ne.jp/~kurogane/
Si cela suscite de l'intérêt, je veux bien m'y coller, sinon je range l'idée dans ma culotte et ce fil se perdra dans les limbes du forum … A vous de voir